Par Guillaume Cornu, avocat
La crise agricole bat son plein et de nombreuses critiques ont été portées contre les normes environnementales cette semaine.
A cet égard, le récent rapport du Haut-Conseil pour le Climat relatif à l’évolution de notre système alimentaire vers un système bas-carbone en date du 25 janvier 2024 confirme cette hypothèse.
Dans son rapport, le HCC souligne précisément que dans le domaine agricole, les agriculteurs sont exposés lourdement au réchauffement climatique qui est source de dommages importants pour leurs exploitations.
En outre, le rapport soulève les difficultés non-liées au réchauffement climatique telles que l’importance des coûts de mise en place des nouveaux systèmes de production pour les agriculteurs, le risque de perte de rendement initial au cours de la transition en l’absence de toute compensation, les besoins de formation et en compétences supplémentaires.
D’autres freins sont encore soulignés par le rapport comme les conséquences de la forte spécialisation au sein des bassins agricoles qui privent les agriculteurs de la complémentarité qu’ils pourraient tirer entre les cultures et l’élevage, ou encore le partage inégal de la valeur entre les acteurs, les faibles revenus de certains, les conditions de travail difficiles et la concurrence internationale.
Le rapport du HCC rappelle que notre système alimentaire représente le deuxième secteur le plus émissif de gaz à effet de serre avec 22 % des émissions tout en ajoutant que les émissions du secteur agricole ont toutefois diminué de 13 % depuis les années 1990 grâce à la réduction du volume des cheptels ou encore à la diminution de l’emploi d’engrais azotés liée notamment à la hausse des prix.
Le rapport du HCC préconise plusieurs mesures pour atteindre les objectifs fixés au sein de la Stratégie Bas-Carbone (soit une diminution de 22 % pour le secteur global de l’alimentation par rapport à 2015 d’ici 2030, 18 % dans le secteur agricole).
Nombreuses sont les mesures susceptibles d’être d’ores et déjà mises en œuvre. Le rapport évoque notamment les pratiques agroécologiques telles que l’irrigation intelligente, la sélection de variétés de plantes ou de races animales plus tolérantes aux températures élevées, la diversification des cultures, la plantation de haies, la modification de l’alimentations des animaux d’élevage.
Bien évidemment, le rapport du HCC revient sur le rôle nécessaire que doivent jouer les acteurs du secteur agroalimentaire en encourageant par exemples les consommateurs à privilégier les protéines végétales tout en limitant leurs achats de produits d’origine animale, en favorisant une offre alimentaire par la sélection et la mise en valeur des produits bas carbone, de saison ou locaux. En effet, la réduction des distances entre les lieux de production et de vente des produits entraine subséquemment une diminution du niveau des émissions de gaz à effet de serre.
Ainsi, comme le souligne le rapport, ce n’est que par une approche globale que les objectifs en matière de réduction des émissions de GES au sein du secteur seront atteints. Les seules pratiques agroécologiques ne suffiront pas si les agriculteurs sont les seuls à supporter le poids de cette réduction.
Le HCC propose d’ailleurs plusieurs scénarios qui confirment la possibilité d’atteindre une réduction des émissions du secteur agricole de 50 % en 2050 par rapport à 2020, voire plus en intégrant le stockage dans les sols. Néanmoins, cela ne serait possible qu’en présence d’une diminution de la consommation des protéines animales de 30 % et la part de l’apport en azote aux cultures de 100 % tandis que la part de l’agriculture biologique passerait à 50 % de la surface utilisée.
Le HCC a enfin indiqué que la revalorisation des revenus des agriculteurs et des éleveurs qui transforment leurs pratiques pourrait être facilitée par une réorientation des dispositifs de soutien et des réglementations en faveur des pratiques bas carbone, que le volet environnemental dans le cadre de la formation des futurs agriculteurs soit adapté et renforcé, y compris pour les conseillers des chambres d’agriculture. Cela permettrait sans doute d’accélérer la transition de l’ensemble du système alimentaire.
On le voit donc, ce que préconise le rapport du HCC appelle au respect de la réglementation applicable en matière d’environnement dans le secteur agricole, par l’adaptation de notre système et l’accompagnement dans la mise en place de pratiques agroécologiques. Cela permettrait d’une part, de respecter nos engagements en matière climatique et d’autre part, d’assurer la pérennité de notre système alimentaire aujourd’hui en souffrance.