CC Česká republika exploitait une décharge de déchets dans l’arrondissement de Praha-Ďáblice, en République tchèque, en vertu d’une autorisation délivrée en 2007. A la fin de l’année 2015, l’entreprise a souhaité obtenir un prolongation de la durée d’exploitation. La ville a accepté et a prolongé la durée d’exploitation jusqu’à la fin de l’année 2017. Cependant, l’arrondissement de la ville ainsi qu’une association de protection de l’environnement ont formé un recours devant le ministère de l’Environnement. Ce-dernier a rejeté la requête au motif que les demandeurs n’étaient pas parties à la procédure de modification de cette autorisation d’exploitation.
La Cour administrative suprême tchèque a adressé une question préjudicielle à la CJUE : Comment convient-il de comprendre la notion de « modification substantielle » d’une installation aux fins de l’application de la directive 2010/75/UE (2)? Plus précisément, la prolongation de la période pendant laquelle des déchets supplémentaires peuvent être acheminés vers une décharge doit-elle être considérée comme étant une modification substantielle de la décharge lorsqu’elle ne modifie ni les dimensions maximales approuvées de la décharge ni sa capacité totale ?
Selon l’avocate générale, Mme Juliane Kokott, « l’importance de la notion de « modification substantielle », que la Cour est amenée à interpréter pour la première fois, réside dans le fait que la modification substantielle d’une installation est soumise à des exigences particulières – notamment en ce qui concerne la participation du public et la protection juridique des tiers, conformément à l’article 20, paragraphe 2, et aux articles 24 et 25 de la directive relative aux émissions industrielles ».
La CJUE a répondu à la question par un arrêt du 2 juin 2022. Elle juge que « la seule prolongation de la durée d’exploitation d’une décharge de déchets ne constitue pas une modification substantielle de l’autorisation d’installation, justifiant une nouvelle autorisation. En outre, dans cette hypothèse, la directive sur les émissions industrielles n’impose pas aux Etats membres de permettre au public concerné de participer au processus décisionnel ni de lui garantir un droit de recours en justice pour en contester la légalité ».
Par conséquent, selon les conclusions de l’avocate générale, « l’article 3, point 9, de la directive 2010/75/UE du Parlement européen et du Conseil, du 24 novembre 2010, relative aux émissions industrielles (prévention et réduction intégrées de la pollution) doit être interprété en ce sens qu’on entend par « modification substantielle » d’une installation également la prolongation de la période de mise en décharge des déchets, sans modification concomitante des dimensions maximales approuvées de la décharge ou de sa capacité totale, lorsque la prolongation de l’autorisation est susceptible d’entraîner des incidences significatives supplémentaires sur l’environnement. Les incidences supplémentaires sur l’environnement sont caractérisées par le fait qu’elles n’ont pas encore été prises en considération dans une autorisation antérieure de l’activité et dans le cadre de la participation du public organisée à cet effet ».
Par Margaux Berthelard, juriste documentaliste