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[RSE, ESG, taxonomie : quelles conséquences pour le monde de l’expertise ? – Par Corinne Lepage]

Par Corinne Lepage, Avocate associée fondatrice du cabinet Huglo Lepage Avocats, Ancienne ministre de l’Environnement

Publié en décembre 2022 dans la revue Experts

L’évolution du rôle de la responsabilité sociale des entreprises et des critères ESG (Environnementaux, sociaux et de gouvernance) associée à la mise en œuvre du nouveau pacte vert européen ont des conséquences juridiques, économiques et financières et génèrent des contentieux. Cette transformation pose également de nouvelles difficultés au monde de l’expertise car le juriste
et l’expert-comptable n’ont pas la compétence pour répondre seuls à des problématiques multiples, tant sur le plan environnemental que sociétal.

Par définition, le monde de l’expertise est aussi étendu que les domaines de compétences. Il suffit de se référer aux catégories, sous-catégories et sous-sous catégories des listes d’experts judiciaires pour le mesurer.
La transformation du rôle de la responsabilité sociale des entreprises et de la politique ESG (environnementale sociale et de gouvernance) du monde de la finance jointe à la véritable révolution que constitue le Green New Deal européen dans ses conséquences
juridiques, économiques et financières ne peut pas être sans conséquence. En effet, et les premiers contentieux sur le devoir de vigilance, le greenwashing ou éco-blanchiment et la publicité mensongère en ce qui concerne les allégations environnementales témoignent ici du caractère parfois technique que peuvent prendre les débats.
Toutefois, ces sujets posent une difficulté particulière au monde de l’expertise : ils dépassent incontestablement un domaine de compétence spécifique. Le juriste, l’expert-comptable n’ont pas la compétence pour répondre seuls à des problématiques
qui font appel à des expertises sur le carbone, sur les politiques climatiques, sur la biodiversité, voire sur les droits
humains et les problématiques sociétales et sociales.
Après avoir très brièvement décrit les différents concepts auxquels il est fait référence, on s’interrogera sur la manière dont le monde de l’expertise peut les aborder.

L’APPARITION DE NOUVEAUX CONCEPTS

Le concept de RSE (responsabilité sociale et environnementale des entreprises) n’est pas nouveau ; il a correspondu
à la montée en puissance des préoccupations environnementales dans les opinions publiques et à la poussée de
la réglementation environnementale. Il a été, durant de longues années dans la plupart des cas, un outil de marketing et de
ce greenwashing assez efficace. La meilleure preuve en est que c’était généralement les directions communication des
entreprises qui en étaient chargées. Une action positive pour l’environnement ou les questions sociales était mise en valeur
permettant ainsi de passer par pertes et profits les atteintes à l’environnement, le travail des enfants et les inégalités salariales
entre hommes et femmes.
L’ESG (critères environnementaux sociaux et de gouvernance) constitue le pilier de l’analyse extra-financière des entreprises et intervient pour évaluer une gestion socialement responsable des entreprises tant à l’égard de leurs salariés que de leurs partenaires sous-traitants et clients. Ce concept s’inscrit dans la logique de la RSE mais sous une forme financière ou plus précisément extra-financière.

Il est utilisé dans l’évaluation des entreprises pour guider les investissements de la part des fonds en particulier, fonds ISR (investissement socialement responsable) mais pas uniquement. Ces outils ont acquis une importance toute particulière en raison du développement de la finance verte mais également de la priorité désormais donnée à la lutte contre le dérèglement climatique et plus récemment à la reconquête de la biodiversité. La politique européenne articulée autour du Green Deal fixe des objectifs très ambitieux en matière de lutte contre le dérèglement climatique avec un objectif de réduction de 55 % des émissions de gaz à effet de serre en 2030 par rapport à 1990 ce qui représente globalement quatre fois l’effort qui a été fait au cours de ces dernières années.

Parallèlement, des fonds considérables ont été mobilisés tant par la Banque centrale européenne (BCE) que par les institutions communautaires pour financer les transitions écologiques et digitales : 1750 milliards d’euros… La question s’est alors posée immédiatement de savoir comment définir les investissements durables qui pourraient bénéficier de ces fonds, d’où la mise en place de ce que l’on appelle la taxonomie ou taxinomie.

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